Le Trochiscanthe nodiflore [TN] n°460 (2015-11)

mardi 17 mars 2015

"Lettre hebdomadaire" du site "Rencontres Sauvages"
explications sur le nom de cette lettre : [ici] ou [ici]
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U2 - One

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Bonne Fête de la "Saint-Patrick" !



Grande Aigrette

Lac de Saint-Point, Vuillecin, la Rivière-Drugeon et Bouverans (Haut-Doubs)
janvier, février, mars 2015


Dans le givre
Lac de Saint-Point (Haut-Doubs)
dimanche 18 janvier 2015

Vol de Grandes Aigrettes
Lac de Saint-Point (Haut-Doubs)

dimanche 18 janvier 2015

Dans l'azur

Lac de Saint-Point (Haut-Doubs)
dimanche 18 janvier 2015

Au bord du Drugeon
Vuillecin (Haut-Doubs)
samedi 28 février 2015

Vol
Vuillecin (Haut-Doubs)
samedi 28 février 2015

Envol
La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)

dimanche 8 mars 2015

De l'autre côté de l'étang

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Dans les roseaux
  La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)
  dimanche 8 mars 2015
<pas de son sur les vidéos !! il y a trop de parasites !>

<image recadrée>

Approche

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En chasse ! 


De plus en plus près !

Plouf !

Derniers instants du Brochet...


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Grande Aigrette, Brochet et... Goéland brun
La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)
dimanche 8 mars 2015

La proie est un peu grosse à avaler...
La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)

dimanche 8 mars 2015

Envol
La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)

  dimanche 8 mars 2015

... mais la brochet est tombé !
La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)

dimanche 8 mars 2015

La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)
dimanche 8 mars 2015
<image recadrée>

Autrefois (fin du XIXéme et début du XXéme siècle),
les plumes des Grandes Aigrettes ornaient les chapeaux des dames...
ce qui a failli causer leur disparition !!
La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)

dimanche 8 mars 2015

Le brochet n'est pas perdu pour tout le monde !
La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)

dimanche 8 mars 2015

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Portrait
La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)

dimanche 8 mars 2015
<image recadrée>

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Tout près !
Avez-vous remarqué sa démarche ?
l'oiseau place d'abord sa tête avant d'avancer le corps...
La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)

dimanche 8 mars 2015

La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)
dimanche 8 mars 2015

De loin !
Bouverans (Haut-Doubs)

dimanche 15 mars 2015

Toilette

A la fin de l'hiver...
Bouverans (Haut-Doubs)

dimanche 15 mars 2015


Pour lire d'autres images,
de Grandes Aigrettes
et des textes sur l'Irlande de Nicolas Bouvier...
cliquez sur les images ci-dessous
(ou sur chaque [numéro])


[numéro 49]


Au bord du Lac de Saint Point (Haut-Doubs) : Cygnes, Foulques, Grêbes...

Texte : Journal d'Aran et d'autres lieux - Nicolas BOUVIER

Mardi 23
janvier 07

[numéro 52]


Vue sur les Alpes,
à partir des balcons du Jura (Haut-Doubs)

Texte : Journal d'Aran et d'autres lieux - Nicolas BOUVIER

Mardi 13
février 07



Temps gris
sur le Lac (Champ-Pittet, Suisse et Maison du Bois, Haut-Doubs)

Texte : Journal d'Aran et d'autres lieux - Nicolas BOUVIER

Mardi 24
juin 08

[numéro 191]

Rougequeue noir femelle (Mont d'Or, Haut-Doubs).

Texte : Journal d'Aran et d'autres lieux - Nicolas BOUVIER

Musique : All souls night - LOREENA MCKENNITT

Mardi 3 novembre 09

[numéro 346]

Duels d'échassiers (Grande Aigrette et Héron cendré) - La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)

Texte : Notes en vrac sur le visage - Nicolas Bouvier

Musique : Symphonie n°6, "le matin" - Haydn

Mardi 4 décembre 2012
[numéro 397]
(2013 - 48)

Sur le bord de l'eau - novembre et décembre 2013 - Haut-Doubs

Texte : L'Usage du Monde (Macédoine) - Nicolas Bouvier

Musique :  High Hope - Pink Floyd (David Gilmour)

mardi 17 décembre 2013



Petit texte :

"1905-1929

Allan Emmanuel Karlsson naquit le 2 mai 1905. La veille, le 1er, sa mère avait défilé dans les rues de Flen, où elle manifestait pour le droit de vote des femmes, la semaine de quarante-huit heures et autres utopies. Son effort ne se révéla cependant pas inutile : il déclencha les contractions et lui permit de mettre au monde son premier et unique enfant, de sexe masculin. L'accouchement eut lieu dans une ferme d'Yxhult avec l'aide d'une vieille voisine qui n'avait aucune compétence de sage-femme mais une certaine notoriété locale puisqu'elle avait, à l'âge de neuf ans, fait la révérence à Charles XIV, ancien camarade (eh oui) de Napoléon Bonaparte en personne. À la décharge de la commère, l'enfant qu'elle aida à mettre au monde atteignit l'âge adulte et plus encore.

Le père d'Allan Karlsson était un homme attentionné qui se mettait facilement en colère. Attentionné avec sa famille, il était en colère contre la société en général et tous ceux qui détenaient le pouvoir en particulier. Il n'était d'ailleurs pas très apprécié par le gratin de sa communauté, surtout depuis le jour où il s'était donné en spectacle au milieu de la Grand-Place de Flen en militant pour la contraception, ce qui lui avait valu une amende de dix couronnes. Pour lui, le problème ne se posa plus. La mère d'Allan, profondément humiliée, lui interdit l'accès à sa chambre à coucher. Allan entrait à l'époque dans sa sixième année et s'estima suffisamment grand pour demander à sa mère pourquoi le lit de papa avait soudain été déménagé dans le bûcher derrière la cuisine. La seule réponse qu'il obtint fut qu'il ferait mieux de s'abstenir de poser autant de questions s'il ne voulait pas prendre une claque. Allan n'avait pas plus envie de prendre des claques que n'importe quel autre petit garçon ; il laissa tomber l'affaire.

À dater de ce jour, le père d'Allan se montra de moins en moins dans sa propre maison. Le matin, il partait consciencieusement effectuer son travail de cheminot, et le soir il se rendait à des réunions un peu partout pour discuter politique avec ses camarades socialistes. Quant à ce qu'il faisait de ses nuits, Allan ne le sut jamais.

Toutefois le père faisait face à ses responsabilités, financièrement parlant au moins. Il apportait la majeure partie de sa paye à sa femme, toutes les semaines, jusqu'au jour où il fut mis à la porte des chemins de fer pour avoir maltraité un passager qui avait osé dire qu'il se rendait à Stockholm, à l'instar de milliers d'autres, pour honorer son roi et demander sa protection. « Commence par te protéger de celle-là », avait rétorqué le père d'Allan en lui balançant une droite qui l'avait collé à son siège. Licencié sans préavis, le père d'Allan n'était plus en mesure de subvenir aux besoins de sa famille.

Ayant désormais la réputation d'un homme violent doublé d'un fervent défenseur de la contraception, il était inutile qu'il espère retrouver un emploi. Il n'avait plus qu'à attendre la révolution, ou mieux encore à accélérer sa venue puisque décidément les choses traînaient en longueur. Le père d'Allan était capable de détermination quand le jeu en valait la chandelle. Le socialisme suédois avait besoin d'un ambassadeur à l'étranger. C'était le seul moyen de faire bouger les choses et de forcer l'épicier Gustavsson et ses semblables à réfléchir un peu.

Le père d'Allan fit ses bagages et partit en Russie pour renverser le tsar. Le salaire du cheminot manqua bien sûr à la mère d'Allan, mais elle se félicita que son mari ait débarrassé le plancher du bûcher, et du pays.

Le chef de famille ayant émigré, madame Karlsson et son fils Allan, qui avait maintenant dix ans, durent se débrouiller pour faire bouillir la marmite. La mère fit abattre autour de la ferme quatorze bouleaux adultes qu'elle débita et vendit comme bois de chauffage. Allan décrocha un emploi de coursier dans une filiale de la société Nitroglycerin AB, dont l'usine se trouvait dans la banlieue de Flen.

Dans les missives qui arrivaient régulièrement de Saint-Pétersbourg (rebaptisée Petrograd à cette même époque), la mère d'Allan put à sa grande surprise constater que l'idéologie socialiste du père avait rapidement pris du plomb dans l'aile. Il arrivait de plus en plus souvent que le père d'Allan, parlant dans ses lettres de ses relations et amis, fasse mention de divers membres de l'establishment politique de Petrograd. L'homme qu'il citait le plus fréquemment s'appelait Carl. Allan trouvait que ça ne faisait pas très russe, encore moins quand son père l'appelait Fabe.

D'après le père d'Allan, le Fabe en question considérait que la plupart des hommes ne savent pas ce qui est bon pour eux et ont besoin qu'on leur tienne la main. C'est pour cette raison que l'autocratie est supérieure à la démocratie, à partir du moment où il existe une structure sociale d'intellectuels et de personnes responsables qui s'assure que l'autocrate en question se conduise bien. Fabe arguait avec un certain mépris que sept bolcheviques sur dix étaient analphabètes, et qu'on ne pouvait tout de même pas laisser le pouvoir à une bande d'analphabètes !

Dans les lettres qu'il envoyait à sa famille à Yxhult, le père d'Allan avait tout de même trouvé des circonstances atténuantes aux bolcheviques sur ce dernier point. « Car vous n'imaginez pas, écrivait-il, à quoi ressemble l'alphabet russe. Il ne faut pas s'étonner que les gens ne parviennent pas à apprendre à lire. »

Il était surtout choqué par la façon dont se comportaient ces bolcheviques. Ils étaient sales, et ils buvaient autant de vodka que les ouvriers suédois qui avaient posé des rails à travers tout le Södermanland. Le père d'Allan s'était souvent demandé comment les rails pouvaient être droits avec toute l'eau-de-vie qu'ingurgitaient les cheminots, et il trouvait suspect le moindre virage sur une voie ferrée suédoise.

Avec les bolcheviques, c'était encore pire Fabe prétendait que le socialisme prendrait fin quand tous les socialistes se seraient entretués jusqu'à ce qu'il n'en reste qu'un et que celui-là prenne le pouvoir. Autant se rallier tout de suite à la cause du tsar Nicolas, un homme bon et cultivé qui avait de grands desseins pour le monde.

Fabe parlait en connaissance de cause, puisqu'il l'avait rencontré, et plus d'une fois. D'après lui, le souverain était un être réellement généreux. C'était juste un homme qui n'avait pas eu de chance, mais sa malchance ne pouvait tout de même pas durer éternellement. Il avait été victime des mauvaises récoltes et des révoltes paysannes contre les bolcheviques. Et puis les Allemands s'étaient mis à faire des histoires parce qu'il mobilisait ses troupes. Pourtant il ne l'avait fait que dans le but de maintenir la paix. Ce n'était pas le tsar qui avait fait assassiner l'archiduc et son épouse à Sarajevo, après tout !

Ainsi raisonnait le Fabe en question, et d'une façon ou d'une autre il avait réussi à convaincre le père d'Allan. Ce dernier ressentait, semble-t-il, une sorte d'empathie et de confraternité avec ce tsar malchanceux. La chance devait nécessairement tourner tôt ou tard, que ce fut pour les tsars de Russie ou pour le simple et honnête citoyen de la région de Flen.

Le père n'envoya jamais d'argent de Russie, mais au bout de quelques années Allan et sa mère reçurent de sa part un paquet contenant un oeuf qu'il disait avoir gagné au jeu, contre son fameux copain russe qui, à part boire, discuter et jouer aux cartes avec lui, ne faisait pas grand-chose d'autre de ses journées que de fabriquer ce genre d'oeufs décoratifs.

Le père d'Allan faisait cadeau de l'oeuf à sa « chère épouse », qui se mit en colère et dit que ce fichu imbécile aurait mieux fait de lui envoyer un oeuf véritable, qui leur aurait au moins rempli l'estomac. Elle faillit le jeter par la fenêtre, mais se ressaisit au dernier moment. L'épicier Gustavsson lui en donnerait peut-être quelque chose, lui qui cherchait toujours à se faire remarquer. Il trouverait peut-être l'oeuf remarquable, allez savoir !

La mère d'Allan fut quand même surprise quand l'épicier Gustavsson lui proposa dix-huit couronnes pour l'oeuf du camarade Fabe. Certes sous forme de crédit ouvert dans son épicerie, mais tout de même !

Ensuite la mère d'Allan espéra voir arriver d'autres oeufs par la poste ; au lieu de cela, elle reçut une missive lui annonçant que les généraux du tsar avaient laissé tomber leur monarque et que celui-ci allait devoir se retirer. Dans cette lettre, le père d'Allan maudissait son ancien copain fabricant d'oeufs, qui en avait profité pour s'exiler en Suisse. Lui avait fermement l'intention de rester et de lutter contre ce bouffon parvenu qui avait maintenant pris le pouvoir et qu'on appelait Lénine.

Il en faisait une affaire personnelle. En effet Lénine avait osé interdire toute propriété foncière individuelle le jour même où le père d'Allan avait acheté douze mètres carrés de bonne terre russe dans l'intention d'y cultiver des fraises suédoises. « J'ai acheté ce lopin de terre pour quatre roubles seulement, mais on ne m'expropriera pas impunément de mon champ de fraises ! » disait le père d'Allan dans la toute dernière lettre qu'il écrivit à sa famille. Il achevait son courrier par ces mots : « Maintenant, c'est la guerre ! » Effectivement, c'était la guerre. Dans le monde entier ou presque, et elle durait depuis des années.

Elle avait éclaté peu après qu'Allan eut commencé son travail de coursier chez Nitroglycerin AB. Tout en chargeant ses cartons de dynamite, Allan écoutait les commentaires des ouvriers sur l'actualité. Il se demandait comment ils pouvaient être au courant d'autant de choses, et surtout il avait du mal à comprendre comment les adultes pouvaient se comporter de manière aussi déraisonnable. L'Autriche avait déclaré la guerre à la Serbie. L'Allemagne avait déclaré la guerre à la Russie. Puis les Allemands avaient pris le Luxembourg en un après-midi avant de déclarer la guerre à la France. Sur ce, l'Angleterre avait déclaré la guerre à l'Allemagne qui avait riposté en déclarant la guerre à la Belgique. L'Autriche avait déclaré la guerre aux Russes et la Serbie à l'Allemagne.

Et ainsi de suite. Les Japonais et les Américains devinrent alliés. Pour une raison ou pour une autre, les Anglais prirent Bagdad, puis Jérusalem. Les Grecs et les Bulgares se firent la guerre entre eux, et puis il fallut que le tsar de Russie abdique, pendant que les Arabes conquéraient Damas...

« C'est la guerre », avait déclaré son père. Peu après, les hommes de main de Lénine assassinèrent le tsar et toute sa famille. Allan en déduisit que la malchance de Nicolas persistait.

Quelques semaines plus tard, l'ambassade de Suède à Petrograd envoya un télégramme à Yxhult annonçant la mort du père d'Allan. Il n'entrait vraisemblablement pas dans les attributions du diplomate de donner plus de détails sur ce décès, mais il n'avait peut-être pas pu s'en empêcher.

D'après le haut fonctionnaire, le père d'Allan aurait construit une palissade autour d'un terrain de dix ou quinze mètres carrés et proclamé la parcelle « république autonome ». Il aurait baptisé son petit lopin de terre « La Vraie Russie », et serait mort dans le tumulte qui avait suivi l'irruption de deux soldats du gouvernement venus démolir sa palissade. Il aurait combattu les soldats avec ses poings dans sa ferveur à défendre les frontières de son territoire, et les soldats auraient été incapables de lui faire entendre raison.

Ils n'avaient finalement pas trouvé d'autre solution que de lui tirer une balle entre les deux yeux, afin de pouvoir continuer à travailler tranquillement.

-- Tu n'aurais pas pu mourir d'une façon un peu moins bête ? dit la mère d'Allan après lecture du télégramme de l'ambassade.

Elle ne pensait pas voir son mari rentrer un jour à la maison, mais ces derniers temps elle s'était quand même mise à l'espérer, à cause de ses problèmes pulmonaires et de ses difficultés à garder la cadence à la scierie. Elle poussa un gros soupir rauque et ce fut la fin de son deuil. Elle informa Allan que désormais les choses étaient comme elles étaient et que l'avenir serait ce qu'il serait. Puis elle lui mit tendrement les cheveux en désordre et retourna couper du bois..."

Jonas JONASSON - Le Vieux qui ne voulait pas fêter son anniversaire



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