Le Trochiscanthe nodiflore [TN]

n°879 (2023-28)

mardi 1er août 2023

"Lettre hebdomadaire" du site "Rencontres Sauvages"
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CALDARA - La Concordia de Pianeti

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pour la
"Margotte" !



  Le printemps 2023...




Escapades photographiques
en

Suisse
(première partie - en montagne)
juillet 2023



Blaireaux (deux jeunes de l'année dernière)
Suisse
vendredi 7 juillet 2023


Blaireau (jeune de l'année dernière)
Suisse
vendredi 7 juillet 2023


Blaireau
Suisse
vendredi 7 juillet 2023



Vaches
Au pied du Chasseron (Suisse)
vendredi 14 juillet 2023


Deux Marmottes dans les herbes
Au pied du Chasseron (Suisse)
vendredi 14 juillet 2023



Sommet d'un Sapin
Au pied du Chasseron (Suisse)
vendredi 14 juillet 2023



Les "Dénériaz"
Au pied du Chasseron (Suisse)
vendredi 14 juillet 2023



Cirse acaule
Au pied du Chasseron (Suisse)
vendredi 14 juillet 2023



Citron sur une fleur de Pois de senteur
Penthaz (Suisse)
vendredi 14 juillet 2023

Pois de senteur
Penthaz (Suisse)
vendredi 14 juillet 2023



Xylocope violet
Penthaz (Suisse)
vendredi 14 juillet 2023

Pétasite hybride
Vallorbe (Suisse)
vendredi 14 juillet 2023




Zygène
sp.

Vallorbe (Suisse)
vendredi 14 juillet 2023


Jeune Cincle plongeur
Vallorbe (Suisse)
vendredi 14 juillet 2023

Z
Vallorbe (Suisse)
vendredi 14 juillet 2023

En flou-filé...
Vallorbe (Suisse)
vendredi 14 juillet 2023



Bergeronnette des ruisseaux
Vallorbe (Suisse)
vendredi 14 juillet 2023



Cincle plongeur (juvénile)
Vallorbe (Suisse)
vendredi 14 juillet 2023



Grande Astrance
Vallon des Dénériaz (Suisse)
samedi 15 juillet 2023



Alchemille des Alpes
Vallon des Dénériaz (Suisse)
samedi 15 juillet 2023



Millepertuis de Richer
Vallon des Dénériaz (Suisse)
samedi 15 juillet 2023



Moiré blanc-fascié
Vallon des Dénériaz (Suisse)
samedi 15 juillet 2023



Vallon des Dénériaz (Suisse)
samedi 15 juillet 2023

Marmotte adulte
Vallon des Dénériaz (Suisse)
samedi 15 juillet 2023



Bain de soleil
Vallon des Dénériaz (Suisse)
samedi 15 juillet 2023



Sous un Sorbier des oiseaux

Vallon des Dénériaz (Suisse)
samedi 15 juillet 2023



Marmotte adulte à sa toilette
Vallon des Dénériaz (Suisse)
samedi 15 juillet 2023




Origan
Vallon des Dénériaz (Suisse)
samedi 15 juillet 2023



Campanule "blanche"
Vallon des Dénériaz (Suisse)
samedi 15 juillet 2023



Vue sur le vallon...
Vallon des Dénériaz (Suisse)
samedi 15 juillet 2023

Les "Roches éboulée"
Vallon des Dénériaz (Suisse)
samedi 15 juillet 2023



Pour relire d'autres textes de Italo CALVINO
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[numéro 643]
(2018 - 43)


Affûts d'automne I - Courvières, Haut-Doubs - octobre 2018

Texte :  Pourquoi lire les classiques ? - Italo Calvino

Musique :  Hans Zimmer - Time

mardi 23
octobre
2018
[numéro 420]
(2014 - 21)

Dans un Frêne... -
avril, mai 2014 - La Rivière-Drugeon, Haut-Doubs

Texte : Le baron perché - Italo Calvino

Musique : I Wish you were here - Pink Floyd (David Gilmour)

mardi 3
juin 2014



Suggestion de lecture :

"Tu es sur le point de commencer le nouveau roman d’Italo Calvino, Si une nuit d’hiver un voyageur. Détends-toi. Recueille-toi. Chasse toute autre pensée de ton esprit. Laisse le monde qui t’entoure s’estomper dans le vague. Il vaut mieux fermer la porte ; là-bas la télévision est toujours allumée. Dis-le tout de suite aux autres : « Non, non, je ne veux pas regarder la télévision. » Lève la voix, sinon ils ne t’entendront pas : « Je suis en train de lire ! Je ne veux pas être dérangé. » Il se peut qu’ils ne t’aient pas entendu avec tout ce bazar ; dis-le à haute voix, crie : « Je vais commencer le nouveau roman d’Italo Calvino ! » Ou si tu ne veux pas, ne le dis pas ; espérons qu’ils te laissent tranquille.

Prends la position la plus confortable qui soit : assis, allongé, lové, couché. Couché sur le dos, sur un côté, sur le ventre. Dans un fauteuil, sur le divan, dans le fauteuil à bascule, sur la chaise longue, sur un pouf. Dans le hamac, si tu as un hamac. Sur le lit, bien sûr, ou dans le lit. Tu peux aussi te mettre tête en bas, comme au yoga. Avec le livre à l’envers, cela va de soi.
Bien sûr, la position idéale, pour lire, on ne la trouve jamais. Autrefois on lisait debout, devant un lutrin. On avait l’habitude de rester debout sans bouger. On se reposait ainsi quand on était fatigué de faire du cheval. Personne n’a jamais pensé à lire sur un cheval ; et pourtant, l’idée de lire à cheval, le livre posé sur la crinière, ou peut-être accroché aux oreilles du cheval avec une bride spéciale, cette idée t’attire maintenant. Les pieds dans les étriers, on doit être très à l’aise pour lire ; avoir les pieds qui ne touchent pas terre, c’est la première condition pour jouir de la lecture.

[...]

Dans la vitrine de la librairie, tu as aussitôt repéré la couverture et le titre que tu cherchais. Sur la trace de ce repère visuel, tu t’es aussitôt frayé un chemin dans la boutique, sous le tir de barrage nourri des livres-que-tu-n’as-pas-lus, qui sur les tables et les rayons, te jetaient des regards noirs pour t’intimider. Mais tu sais que tu ne dois pas te laisser impressionner. Que sur des hectares et des hectares s’étendent les livres-que-tu-peux-te-passer-de-lire, les livres-faits-pour-d’autres-usages-que-la-lecture-, les-livres-qu’on-a-déjà-lus-sans-avoir-besoin-de-les-ouvrir-parce-qu’ils-appartiennent-à-la-catégorie-du-déjà-lu-avant-même-d’avoir-été-écrits.

Tu franchis donc la première rangée de murailles : mais voilà que te tombe dessus l’infanterie des livres-que-tu-lirais-volontiers-si-tu-avais-plusieurs-vies-à-vivre-mais-malheureusement-les-jours-qui-te-restent-à-vivre-sont-ceux-qu’ils-sont. Tu les escalades rapidement, et tu fends la phalange des livres-que-tu-as-l’intention-de-lire-mais-il-faudrait-d’abord-en-lire-d’autres, des-livres-trop-chers-que-tu-achèteras-quand-ils-seront-revendus-à-moitié-prix, des livres-idem-voir-ci-dessus-quand-ils-seront-repris-en-poche, des-livres-que-tu-pourrais-demander-à-quelqu’un-de-te-prêter, des-livres-que-tout-le-monde-a-lus-et-c’est-donc-comme-si-tu-les-avais-lus-toi-même. Sous les tours du fortin, face aux efforts d’interception des livres-que-depuis-longtemps-tu-as-l’intention-de-lire, des-livres-que-tu-as-cherchés-des-années-sans-les-trouver, des-livres-qui-concernent-justement-un-sujet-qui-t’intéresse-en-ce-moment, des-livres-que-tu-veux-avoir-à-ta-portée-en-toute-circonstance, des livres-que-tu-pourrais-mettre-de-côté-pour-les-lire-peut-être-cet-été, des-livres-dont-tu-as-besoin-pour-les-aligner-sur-un-rayonnage, des-livres-qui-t’inspirent-une-curiosité-soudaine-frénétique-et-peu-justifiable.

Bon tu as au moins réussi à réduire l’effectif illimité des forces adverses à un ensemble considérable, certes, mais cependant calculable, d’éléments en nombre fini, même si ce relatif soulagement est mis en péril par les embuscades des livres-que-tu-as-lus-il-y-a-si-longtemps-qu’il-serait-temps-de-les-relire et des livres-que-tu-as-toujours-fait-semblant-d’avoir-lus-et-qu’il-faudrait-aujourd’hui-te-décider-à-lire-pour-de-bon.
Tu te libères en quelques zigzags et pénètres d’un bond dans la citadelle des nouveautés-dont-l’auteur-ou-le-sujet-t’attire. Une fois dans la place, tu peux pratiquer des brèches entre les rangées de défenseurs. Tu les divises en nouveautés-d’auteurs-ou-de-sujets-déjà-connus (de toi ou dans l’absolu) et nouveautés-d’auteurs-ou-de-sujets-totalement-inconnus (pour toi du moins). Et tu répartis l’attraction qu’ils exercent sur toi selon le besoin, ou le désir que tu as de nouveauté ou de non-nouveauté (de nouveauté dans le non-nouveau- et de non-nouveau dans le nouveau).

Tout cela pour dire qu'après avoir parcouru rapidement du regard les titres des livres exposés, tu as dirigé tes pas vers une pile de "Si par une nuit d'hiver un voyageur" tout frais sorti de chez l'imprimeur, tu as saisi un exemplaire, et tu l'as porté à la caisse pour qu'on établisse ton droit de propriété sur lui.

En passant, tu as jeté aux livres alentour un regard douloureux (mieux : ce sont les livres qui te regardent de cet air douloureux qu'ont les chiens quand ils voient du fond des cages d'un chenil municipal l'un des leurs s'éloigner, tenu en laisse par son maître venu le reprendre). Et tu es sorti.

[…]

Prends la position la plus confortable : assis, étendu, pelotonné, couché. Couché sur le dos, sur un côté, sur le ventre. Dans un fauteuil, un sofa, un fauteuil à bascule, une chaise longue, un pouf. Ou dans un hamac, si tu en as un. Sur ton lit naturellement, ou dedans. Tu peux aussi te mettre la tête en bas, en position de yoga. En tenant le livre à l’envers, évidemment.
Il n’est pas facile de trouver la position idéale pour lire, c’est vrai. Autrefois, on lisait debout devant un lutrin. Se tenir debout, c’était l’habitude. C’est ainsi qu’on se reposait quand on était fatigué d’aller à cheval. Personne n’a jamais eu l’idée de lire à cheval : et pourtant, lire bien droit sur ses étriers, le livre posé sur la crinière du cheval ou même fixé à ses oreilles par un harnachement spécial, l’idée te paraît plaisante. On devrait être très bien pour lire, les pieds dans des étriers ; avoir les pieds levés est la première condition pour jouir d’une lecture.

Bien, qu’est-ce que tu attends ? Allonge les jambes, pose les pieds sur un coussin, sur deux coussins, sur les bras du canapé, sur les oreilles du fauteuil, sur la table à thé, sur le bureau, le piano, la mappemonde. Mais, d’abord, ôte tes chaussures si tu veux rester les pieds levés ; sinon, remets-les. Mais ne reste pas là, tes chaussures dans une main et le livre dans l’autre.
Règle la lumière de façon à ne pas te fatiguer la vue. Fais-le tout de suite, car dès que tu seras plongé dans la lecture, il n’y aura plus moyen de te faire bouger. Arrange-toi pour que la page ne reste pas dans l’ombre : un amas de lettres noires sur fond gris, uniforme comme une armée de souris ; mais veille bien à ce qu’il ne tombe pas dessus une lumière trop forte qui, en se reflétant sur la blancheur crue du papier, y ronge l’ombre des caractères, comme sur une façade le soleil du sud, à midi. Essaie de prévoir dès maintenant tout ce qui peut t’éviter d’interrompre ta lecture. Si tu fumes : les cigarettes, le cendrier, à portée de main. Qu’est-ce qu’il y a encore ? Tu as envie de faire pipi ? À toi de voir.

Ce n’est pas que tu attendes quelque chose de particulier de ce livre particulier. Tu es un homme qui, par principe, n’attend plus rien de rien. Il y a tant de gens, plus jeunes que toi ou moins jeunes, dont la vie se passe dans l’attente d’expériences extraordinaires. Avec les livres, les personnes, les voyages, les événements, tout ce que l’avenir garde en réserve. Toi, non. Tu sais que le mieux qu’on puisse espérer, c’est d’éviter le pire. C’est la conclusion à laquelle tu es arrivé dans ta vie privée comme pour les problèmes plus généraux, et même mondiaux. Et avec les livres ? Justement : comme tu y as renoncé dans tous les autres domaines, tu crois pouvoir te permettre le plaisir juvénile de l’expectative au moins dans un secteur bien circonscrit comme celui des livres. À tes risques et périls : la déconvenue n’est pas bien grave.

Donc, tu as lu dans un journal que venait de paraître Si par une nuit d’hiver un voyageur, le nouveau livre d’Italo Calvino, qui n’avait rien publié depuis quelques années. Tu es passé dans une librairie, et tu as acheté le volume. Tu as bien fait.

[…]

Lectrice, tu es lue. Ton corps est soumis à un déchiffrement systématique , à travers des canaux d'informations tactiles, visuels, olfactifs, et non sans intervention des papilles gustatives. L'ouïe a sa part aussi, attentive à tes halètement et à tes trilles. Le corps n'est pas seul, chez toi, objet de lecture: il compte comme partie d'un ensemble compliqué d'éléments, qui ne sont pas tous visibles ni tous présents, mais qui se manifestent à travers des évènements, eux,visibles et immédiats: tes yeux qui s'embrument , ton rire, les mots que tu dis , ta façon de ramasser ou de répandre tes cheveux, de prendre l'initiative ou d'esquiver, et puis tous ces signes qui sont aux confins des us et coutumes, de la mémoire, de la préhistoire, de la mode;tous les codes , tous les pauvres alphabets au moyen desquels un être humain croit à certains moments être en train de lire un autre être humain.

Et toi aussi, Lecteur, tu es un objet de lecture: tantôt la Lectrice passe ton corps en revue comme si elle parcourait une table des matières, tantôt elle le consulte comme pour obéir à une curiosité rapide et bien précise, tantôt elle l'interroge en hésitant et laisse venir une réponse muette, comme si une investigation partielle ne l'intéressait qu'en vue d'une reconnaissance de l'espace beaucoup plus large. Parfois, elle se fixe sur des détails négligeables, peut-être de petits défauts stylistiques, par exemple la forme proéminente de ta pomme d'Adam, ou ta façon d'enfoncer la tête dans le creux de son cou, et elle s'en sert pour établir une marge , une distance - réserve critique ou complicité moqueuse- parfois, au contraire, un détail incidemment découvert est valorisé outre mesure, par exemple la forme de ton menton, ou une façon particulière de mordre son épaule, et elle prend élan sur ce tremplin, parcourt (vous parcourez ensemble ) page après page , de haut en bas, sans sauter une virgule. Toi, cependant, au milieu des satisfactions que tu trouves à sa façon de te lire, à toutes ces citations textuelles de ton objectivité physique, un doute s'insinue . qu'elle ne te lise pas tout entier tel que tu es, mais qu'elle use de toi, qu'elle utilise des fragments de toi détachés du contexte pour se construire un partenaire fantasmagorique, connu d'elle seule, dans la pénombre de sa demi-conscience; que ce qu'elle en train de déchiffrer soit le visiteur apocryphe de ces songes, plutôt que toi..."

Italo CALVINO - Si par un nuit d'hiver un voyageur



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