Le Trochiscanthe nodiflore [TN]

n°752 (2021-03)

mardi 26 janvier 2021

"Lettre hebdomadaire" du site "Rencontres Sauvages"
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Felix MENDELSSOHN - Trois Motets op. 69
"Herr, nun lässest du deinen Diener in Frieden fahren"

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Givre et glace

Courvières (Haut-Doubs)
novembre et décembre 2020



Cirse vulgaire
Courvières (Haut-Doubs)
samedi 21 novembre 2020

Cardère
Courvières (Haut-Doubs)
samedi 21 novembre 2020

<image recadrée>


Courvières (Haut-Doubs)
samedi 21 novembre 2020

Feuilles de Saule
Courvières (Haut-Doubs)
samedi 21 novembre 2020

Cirse vulgaire
Courvières (Haut-Doubs)
samedi 21 novembre 2020

<image recadrée>

Saule
Courvières (Haut-Doubs)
samedi 21 novembre 2020

Eau (dans une auge)
Courvières (Haut-Doubs)
samedi 21 novembre 2020

Glace
Courvières (Haut-Doubs)
samedi 21 novembre 2020

Courvières (Haut-Doubs)
samedi 21 novembre 2020

Givre
Courvières (Haut-Doubs)
dimanche 22 novembre 2020

Courvières (Haut-Doubs)
dimanche 22 novembre 2020





Framboisier
Courvières (Haut-Doubs)
dimanche 22 novembre 2020

Campanule
Courvières (Haut-Doubs)
dimanche 22 novembre 2020

Framboisier
Courvières (Haut-Doubs)
dimanche 22 novembre 2020

Eglise
Courvières (Haut-Doubs)
dimanche 22 novembre 2020

Perle de glace
Courvières (Haut-Doubs)
dimanche 22 novembre 2020

Rameaux d'Erable sous la glace
Courvières (Haut-Doubs)
samedi 5 décembre 2020

Samare
Courvières (Haut-Doubs)

samedi 5 décembre 2020

<image recadrée>

Courvières (Haut-Doubs)
samedi 5 décembre 2020

Courvières (Haut-Doubs)
samedi 5 décembre 2020

Courvières (Haut-Doubs)
dimanche 6 décembre 2020

Courvières (Haut-Doubs)
dimanche 6 décembre 2020

Courvières (Haut-Doubs)
dimanche 6 décembre 2020




Pour relire un autre texte de Christian GARCIN
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[numéro 431]
(2014 - 32)

L'Autre monde : Renard, Chamois, Marmotte et Lièvre - Haut-Doubs et Suisse - été 2014

Texte : L'autre monde - Christian GARCIN

Musique : Lamento di Tristano - Anonyme (XIVème siècle)

mardi 19
août 2014


Suggestion de lecture :

" 1

UN POLAR ASSEZ SIMPLE


Je suis un chaman, dit Zuo Luo en tirant sur sa clope.

C'est ça, dit Bec-de-canard.

Il fermait les yeux en essayant de se souvenir du film qu'ils avaient vu la veille. Un polar assez simle pourtant, mais auquel il n'avait rien compris, vu qu'il était en anglais et qu'il n'y avait aucun sous-titre disponible en chinois, russe, mongol ni bouriate, les quatre seules langues qu'il parlait.

Chacun était allongé sur son lit. L'un, Zhu Wenguang, dit « Zuo Luo », était un Chinois massif qui fumait en fixant le plafond, indifférent à l'interdiction doublement placardée au-dessus de son lit et ailleurs près de la porte. L'autre, Agvan Djordjé, dit « Bec-de-canard », était chinois aussi, mais davantage du Nord, aurait pu supposer un observateur attentif : les traits un peu plus creusés, les yeux plus ronds, le teint plus brun, avec des cheveux filasse et deux grosses lèvres proéminentes qui lui valaient son surnom.

Une table de nuit en bois clair entre les deux lits accueillait une bible usée à force d'avoir été feuilletée, mais pas par eux.

C'était le matin tôt, du côté de Baker, Californie. Le soleil commençait à filtrer à travers les rideaux.

Quoi, « c'est ça » ?

Cette histoire de chaman. Tu as dû rêver, je t'ai entendu gémir cette nuit. Tu es autant chaman que je suis danseuse étoile.

Zuo Luo soupira.

Tu te racontes trop d'histoires, conclut Bec-de-canard.

C'était nouveau. Depuis quelque temps Bec-de-canard se disait qu'il devait s'affirmer davantage : il avait lu ça dans des magazines. Pendant de trop nombreuses années, se disait-il, il s'était conduit devant Zuo Luo comme une adolescente fascinée par un chanteur de pop aux cheveux en pétard, ou comme une femme plus âgée muette de saisissement face à George Clooney et son sourire nonchalant : il l'avait admiré – jusqu'à l'aveuglement, si ce n'est une certaine servilité consentie. Et maintenant il osait lui répondre de la sorte. Zuo Luo, qui faisait mine de ne rient remarquer de ce changement d'attitude, commençait cependant à estimer qu'il frisait parfois l'impertinence.

Je ne vois pas pourquoi j'essaie de t'expliquer les choses, de toute façon tu ne comprends jamais rien à rien.

Ah bon. Et qu'est-ce qu'il y a à comprendre ?

Oui : l'impertinence.

Que fait un chaman ? Dit patiemment Zuo Luo en exhalant la fumée. La maladie et la mort enlèvent les âmes et les maintiennent dans l'autre-monde. Le chaman part seul, il franchit la frontière entre les mondes, il délivre les âmes, et les restitue à la lumière et à la vie. Que fais-je ? De stupides malfrats enlèvent des jeunes filles après les avoir achetées à vil prix et les maintiennent captives dans quelque lieu sordide. Je pars seul, je pénètre dans ces lieux sordides, je délivre les jeunes femmes et les restitue à leur famille. Je suis un chaman moderne. J'oeuvre dans le secret, dans la nuit, dans les galeries de terriers que sont les ruelles obscures et labyrinthiques de nos villes puantes, comme l'animal dont je porte le nom. Et à présent que j'oeuvre à l'étranger, je suis même un chaman voyageur.

Quel animal ? Dit Bec-de-canard.

Zuo Luo tourna la tête vers lui.

Comment ça, « quel animal » ? Tu ne t'es jamais demandé ce que signifiait mon surnom ? Zuo Luo ?

Ben, c'est pas le type à la télé, là, avec sa petite moustache et son masque à la con ?

C'est un héros de télé, oui, soupira Zuo Luo en fixant le plafond. Mais je te parle de son nom. Zor-ro, fit-il en articulant le mieux possible. Zuo Luo, quoi : ça signifie renard en espagnol.

Ah bon. Et que vient faire l'Espagne là-dedans ?

Le héros de la télé est mexicain, bourrique. Or, quelle est la langue parlée au Mexique ?

Bec-de-canard hésita.

L'espagnol ?

Voilà. Je suis donc un chaman, et un renard.

Si tu veux.

Bien sûr que je veux.

Un silence. Quelques ronds de fumée au-dessus du lit.

Puis :

Toi, c'est un canard que tu as dans le nom.

Il n'y avait pas de cendrier. Il se leva, mouilla le mégot, et le jeta dans la poubelle de la salle de bains.

Ils sortirent. Lorsque Zhu Wenguang, dit Zuo Luo, ferma la porte à clé, il nota que le numéro 6 de leur chambre s'était renversé et formait un 9 qui se balançait doucement. A moins que ce ne fût l'inverse. Il le fixa deux ou trois secondes, attendant qu'il cesse de bouger. Puis il descendit l'escalier extérieur et rejoignit Bec-de-canard sur le parking où ils avaient rangé leur Nissan la veille au soir.

Le soleil commençait à chauffer. Pourtant, comme la veille, c'était surtout un étrange cocon de silence ouaté qu'ils sentaient fondre sur eux.

Tout était vide. Le calme, quasi lunaire. Les trottoirs, larges et propres, comme les avenues, les façades plates des immeubles géométriques, et le ciel transparent au-dessus. La lumière découpait les volumes. Quelques voitures parfois, majoritairement des pickups conduits par des types barbus à casquette, filaient à petite allure. Ensuite le silence se réinstallait, à peine troublé par les froufrous liquides de quelques tourterelles qui se répondaient de toit en toit.

Ils entrèrent dans le bar du motel. Une serveuse aux cheveux de jais leur lança un bonjour chaleureux. Son visage souriant et cuivré.

Tout était si propre que c'en était déstabilisant. Tout semblait aller de soi, paisiblement, dans une sorte de calme et hygiéniste courtoisie à laquelle ils avaient du mal à s'habituer.

Qu'est-ce qu'on fout là ? Fit Bec-de-canard en s'asseyant. Putain, on n'est vraiment pas chez nous..."

Christian GARCIN - Le bon, la brute et le renard



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