Le Trochiscanthe nodiflore [TN]

n°693 (2019-44)

mardi 19 novembre 2019

"Lettre hebdomadaire" du site "Rencontres Sauvages"
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GF Händel - Pena tiranna
Amadigi di Gaula

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Moineaux et Mésanges

Courvières (Haut-Doubs)
octobre, novembre 2019



Mésange charbonnière
Courvières (Haut-Doubs)
samedi 5 octobre 2019




Moineau domestique mâle
Courvières (Haut-Doubs)

samedi 5 octobre 2019

Portrait
<image recadrée>



Moineau domestique femelle,
sous la pluie
Courvières (Haut-Doubs)

samedi 5 octobre 2019

Mésange bleue,
sous la pluie
Courvières (Haut-Doubs)
samedi 5 octobre 2019

Mésange charbonnière,
sous la pluie
Courvières (Haut-Doubs)
samedi 5 octobre 2019

Mésange bleue
Courvières (Haut-Doubs)
dimanche 13 octobre 2019

Courvières (Haut-Doubs)
dimanche 13 octobre 2019
<image recadrée>

<image recadrée>

Courvières (Haut-Doubs)
dimanche 13 octobre 2019

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Courvières (Haut-Doubs)
dimanche 13 octobre 2019



<image recadrée>

Courvières (Haut-Doubs)
dimanche 13 octobre 2019

Dans le Pommier
Courvières (Haut-Doubs)

dimanche 20 octobre 2019

Couple
Courvières (Haut-Doubs)

dimanche 20 octobre 2019

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Courvières (Haut-Doubs)
dimanche 20 octobre 2019

Courvières (Haut-Doubs)
dimanche 20 octobre 2019

Courvières (Haut-Doubs)
lundi 11 novembre 2019

Courvières (Haut-Doubs)
lundi 11 novembre 2019

Courvières (Haut-Doubs)
lundi 11 novembre 2019

Courvières (Haut-Doubs)
lundi 11 novembre 2019
<image recadrée>

<image recadrée>

<image recadrée>

Courvières (Haut-Doubs)
lundi 11 novembre 2019

Courvières (Haut-Doubs)
lundi 11 novembre 2019

Courvières (Haut-Doubs)
lundi 11 novembre 2019

Courvières (Haut-Doubs)
lundi 11 novembre 2019




Suggestion de lecture :

"Car, je pense à quelque chose. Je vois bien la photo mais je pense à quelque chose. Il y a quelques mois, en septembre dernier (je n'en ai pas parlé mais maintenant je vais en parler), j'étais à ma ferme, à la Margotte, près de Forcalquier. Je finissais d'écrire Un roi sans divertissement. J'en étais au moment où Langlois va fumer sa cartouche de dynamite. Chaque soir, après avoir écrit mes quatre pages, j'allais me promener. La Margotte est assise sur un emplacement magnifique. Ce que j'aime surtout, ce sont les tribus de vieux chênes installés sur tous les coteaux. Ce sont des arbres énormes, très vastes et très hauts. Leur ombre a nettoyé tout le sous-bois qui est clair, net, pelucheux de petite herbe sèche. Ils vivent là, depuis des siècles, avec des foules d'oiseaux, d'écureuils, de petits mammifères et même de renards. Ils sont blonds. Ils sont solides. Ils ont une peau très épaisse, verdâtre, plissée, avec des reflets d'or. Ils sont très vieux. Si on essaye d'imaginer combien il a fallu de temps pour que, du gland, puissent sortir et se former ces énormes troncs que quatre ou cinq hommes se tenant par la main, ne peuvent embrasser ; pour que puisse s'élever cet extraordinaire échafaudage de branches, on se perd dans la nuit des temps. Et, actuellement, je ne connais pas de repos plus magnifique que celui qui consiste, quand on le peut, à se perdre dans la nuit des temps. Je suis par conséquent souvent par monts et par vaux à travers les forêts de chênes. Ce jour-là, après avoir mené Un roi à deux ou trois pages de la fin, je partis vers les quatres heures de l'après-midi. Je me proposais d'aller visiter un canton où je n'étais encore jamais allé. C'était sur une selle de terre un peu haute, en direction de Niozelles où, à diverses reprises, des architectures d'espaces m'avaient attiré.

Il faisait froid par grand vent. Je jugeai même prudent d'emporter ma pélerine. Je me dis qu'il serait sans doute très agréable, si je me trouvais un abri dans la hauteur, de me planquer au dos de quelque terre et de profiter de ces dépaysements de lumière que le vent installe sur ces pays. Le mugissement continu aussi du vent du nord est très reposant quand on le sent qui préside au déploiement de ces grands décors alternativement dorés et bleu sombre qui font jouer aux arbres, aux herbes et aux grands oiseaux des drames plus particulièrement pathétiques.

J'avais des chances, dans ces parages solitaires, de voir les aigles gris et les faucons qui affectionnent ces bouleversements et ces charrois d'ombres et de lumières, et je me proposais, une fois planqué, de me tenir très immobile, de façon à voir toutes les bêtes. Par ces temps-là, elles ne sortent que contraintes ; le vent qui brouille et emporte les bruits diminuant considérablement l'usage de leur appareil de sécurité ; mais c'était l'heure où, malgré tout, la faim devait les contraindre à sortir ; la faim et l'approche du crépuscule. Rien n'est plus beau que l'apparition bondissante d'un renard ébouriffé aux prises avec les grandes peurs.

La montée était beaucoup plus douce que ce que je croyais. Elle se faisait dans des prés jaunâtres très mollement ondulés, lovés, aurait-on dit, dans une immense coquille d'escargot qui était le large vallon dans lequel je marchais. Il me suffisait d'aller d'un bord à l'autre en marchant dans l'herbe jaune par de grandes orbes en spirale pour ne pas sentir la montée. Le vent même passait au-dessus de ma tête et ne me touchait pas. Il faisait tiède.

Tout ce jour-là devant être parfait, je trouvai l'abri désiré. Le spectacle que j'avais sous les yeux était très exceptionnel. Il ne s'agissait plus ni de la Margotte, ni de 1947, ni de rien qui puisse s'exprimer par un chiffre déterminé depuis la mort de Jésus-Christ.

C'était le paysage de Don Quichotte, le paysage qui baigne les textes de Machiavel, de Froissart, une image paradisiaque de Dante, ce que saint Bonaventure voyait en écrivant sur les anges.

Cette crête, ou plus exactement ce plateau de crête (car le territoire avait au moins deux kilomètres de large et trois à quatre de long, sur lequel depuis des siècles le vent avait raréfié les arbres, ne laissant subsister que les plus forts), portait trois ou quatre fermes, très blanches, hautes comme des tours, cramponnées dans la terre par des bases solides, des flanquements d'arcs-boutants. Silence ; rien que le vent. Aux fermes, pas de vie ; autour, ni poules, ni coqs, ni vols de pigeons ; on pourrait même dire : ni champs ; elles sortaient nues et crues d'une terre uniformément couverte d'herbe d'un ocre presque rose.

Pas de fenêtres : des murs, de très hauts murs ; j'ai dit des tours, des tours carrées, crépies de blanc et, là-haut, presque sous les tuiles, une ou deux lucarnes. Les tuiles tressées en génoises doubles, triples, même quadruples autour du front de ces tours ; comme des couronnes d'épis de blé, d'épaisses tresses de laurier, les épaisses tresses de cheveux de Frédégonde et de Brunehaut, mais arrondies en couronne autour des têtes. A l'une, à l'autre de ces fermes, qui sur le gorgerin comme Sorel, qui sur le front comme la Joconde, qui sur le flanc comme la Simonetta, le bijou d'émail d'une fenêtre de pigeonnier entourée de ces rectangles, rosaces, triangles, étoiles, losanges de carreaux vernis, pourpres, verts, dorés et bleu roi qu'on place là pour empêcher les rats d'aller manger les petits pigeons en grimpant par le crépi de la façade.

Toujours silence, bien entendu, et ces trois, quatre fermes très éloignées les unes des autres, le plus qu'elles peuvent ; se tournant le dos, d'ailleurs. Pas de chemin de l'une à l'autre.

Je le répète : pas de champs.

Entre ces fermes solitaires, de grands arbres, solitaires ; pas trop : les plus forts seuls ont résisté, et, pour un arbre, être fort c'est être beau ; donc, de très beaux arbres déjà en ferronnerie pure malgré la saison, déjà dépouillés entièrement de feuilles et forgés, martelés en volutes d'une délicatesse de dentelle, entièrement, jusqu'au plus petit des rameaux.

A travers ces arbres, derrière ces hautes tours rutilantes de chaux et ornées de joyaux et couronnes : le plein ciel, si on lui donne son sens de pleine mer avec ses baleines blanches, ses écumes et son azur violet ; car, ce haut pays appuie ce qu'il porte sur le haut du ciel..."

Jean GIONO - Noé



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