Le Trochiscanthe nodiflore [TN]

n°621 (2018-21)

mardi 22 mai 2018

"Lettre hebdomadaire" du site "Rencontres Sauvages"
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Giuseppe Verdi - Les Vêpres siciliennes
Ouverture

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La parade des Grèbes

Champ-Pittet, Yverdon (Suisse)
lundi 7 mai 2018, matin

Au lever du soleil
Champ-Pittet, Yverdon (Suisse)

lundi 7 mai 2018

"Devant les derniers roseaux lacustres du Léman savoyard, les grandsgrèbes se pressent de nouveau, tout enfiévrés de leurs fêtes. Par dizaines, leurs longs cous blancs se dressent,panachés de foisonnantes huppes et collerettes rousses et noires, semblables à des fleurs qui frémissent. Encouples, face à face, les oiseaux se livrent à leurs cérémonies rituelles, entrecoupées de plongées,de poursuites et de mimiques où chaque posture, chaque geste a sa signification. Des caquètements et de rauques éclatsde voix ponctuent ces danses aquatiques si étranges à nos yeux. Quelle ferveur, quelle débauche d'énergie, deparures et de parades dans ces sortes de bacchanales surgies du fond des âges, inlassablement recommencées au fil des jours,à la saison des amours !..."

Paul Géroudet - Les oiseaux du Lac Léman




Grèbe huppé
Champ-Pittet, Yverdon (Suisse)
lundi 7 mai 2018


Reflet
Champ-Pittet, Yverdon (Suisse)

lundi 7 mai 2018


Emergence
Champ-Pittet, Yverdon (Suisse)

lundi 7 mai 2018

Couple effectuant la
"danse de pingouin"
Champ-Pittet, Yverdon (Suisse)

lundi 7 mai 2018

"L'un des oiseaux, (ou les deux), plonge et reparaît avec quelques débris végétaux au bec ; il arrive alors que mâle et femelle émergent ensemble et face à face, et se dressent verticalement sur leur arrière-train, poitrine contre poitrine et secouant la tête..." [Cette phase, la "danse de Pingouin" est rarement observée il est vrai et marque sans doute une intensité exceptionnelle de la parade.]

Paul Géroudet - Les Palmipèdes

Parade
Champ-Pittet, Yverdon (Suisse)

lundi 7 mai 2018

"Bizarre cérémonie ! Face à face, le mâle et la femelle tendent le cou, étalent en éventail leur collerette, redressent leur huppe et secouent la tête rapidement ou lentement, le tout accompagné d'un caquètement saccadé..."

Paul Géroudet - Les Palmipèdes





Couple de Grèbe castagneux
Champ-Pittet, Yverdon (Suisse)

lundi 7 mai 2018

<image recadrée>


Grèbe castagneux
<image recadrée>


Champ-Pittet, Yverdon (Suisse)
lundi 7 mai 2018

Grèbe castagneux
<image recadrée>

Grèbe castagneux
<image recadrée>

Portrait
<image recadrée>

<image recadrée>

Combat
sous l'eau

<image recadrée>

Cygne tuberculé
<image recadrée>

Toilette

En contre-jour

<image recadrée>

Nette rousse mâle s'étirant

Dans l'ombre

Nette rousse mâle

Vue sur le lac et le Jura
Champ-Pittet, Yverdon (Suisse)

lundi 7 mai 2018



Suggestion de lecture :

"L'armée impériale de Russie avec sa masse immense et ses milliers de bivouacs leur apparut d'un seul coup, lorsqu'ils eurent franchi une crête. Georges eut un cri d'étonnement et Jean-Baptiste lui-même ne put se défendre d'être saisi. Dans ces espaces infinis, couverts d'un ciel tourmentés, ils n'avaient jusqu'à présent vu personne ou presque : de rares maisons, parfois un cheval, la famille d'un colon, une troupe clairsemée de Tartares. Et soudain, toute l'humanité était là, multiple, disséminée en particules humaines, en chevaux minuscules vus d'aussi loin, en chariots, en armes, en tas de boulets, mais unique en vérité, rassemblée dans le corps de la grande armée dont on pouvait distinguer le tronc, les membres, la tête et les ailes, posée comme un oiseau de proie sur la rugueuse surface des landes et des bois.

Ils étaient au vent quand ils reçurent cette première apparition ; aucun bruit ne leur parvenait de cette multitude. Le silence rendait la foule plus imposante encore. Eux ne parlèrent pas non plus tandis qu'ils descendaient lentement vers les avant-postes.

Ces sentiments de respect et même de crainte se dissipèrent vite dès qu'ils furent mêlés aux premières unités. A l'ordre qu'on pouvait supposer, de loin, se substituait une confusion inimaginable. Composée de toutes les nations de l'empire, cette grande armée n'était forte que de misères rassemblées. Tout y prenait sa place en vertu de miracles invisibles mais permanents qui permettaient à des hommes de se comprendre sans parler la même langue, à des ordres d'être transmis sans que personne n'en prît la responsabilité, à la faim et aux maladies d'être évitées sans qu'aucune organisation ne vînt expliquer comment. On comprenait mieux que les oriflammes frappées de l'aigle, les bannières figurant une croix orthodoxe et même de sinistres toiles représentant le martyre du Christ fussent sans arrêt brandies en l'air, fichées au sol pendant les haltes, portées à bout de bras au cours des marches : il n'aurait pas fallu que la protection divine, accordée au nom de la tradition et de la foi, fît un instant défaut car c'était bien sur elle et sur elle seule que reposait le soin de faire battre ce grand coeur et combattre ce corps sans substance.

On était au début de l'après-midi ; ce n'était pas l'heure où ce spectacle était le plus pitoyable ; il fallait venir à l'aube. Là, dans toute la plaine où s'étalait l'armée montaient des plaintes déchirantes. A cette heure redoutée, les soldats, deux par deux, l'un assis et l'autre penché sur sa victime, exécutaient le seul ordre de Pierre Ier qu'ils détestassent unanimement : certains avec le tranchant d'un sabre, d'autres avec un tesson, un éclat de malachite ou d'obsidienne et fort rarement hélas avec une véritable lame, ôtaient de leurs peaux rougies et gercées par ce ce soin quotidien toute trace de ces barbes que l'empereur avait prohibées. Ainsi, cette armée martyre joignait-elle à sa bravoure et à son anarchie le ridicule d'être la seule au monde à se lancer à l'assaut déjà couverte des balafres qu'elle s'était infligées elle-même.

La présence du colonel Saint-Août était un sésame dans ce chaos. Il y était connu ; on le saluait et, plus extraordinaire, il paraissait y retrouver son chemin. Après avoir traversé tout un campement de cavalerie puis deux régiments de marche bouriates, ils parvinrent à un hameau de pierre qui devait constituer le seul habitat de cette plaine avant que la nuée vînt l'envahir. Les toits de ces chaumières n'avaient pas de gouttière et le bas des murs portait la trace noire des pluies du printemps. Par une fenêtre ouverte, ils virent une chambre bien tenue, garnie de deux lits sur lesquels étaient posés des casques de cuivre à crinière. Sans doute était-ce le logement de campagne des officiers. Saint-Août fit asseoir les trois étrangers sur le rebord de cette fenêtre, ordonna de décharger les bagages le long du mur et s'éloigna un instant. Il conféra avec deux personnages galonnés qui jetaient des coups d'oeil en direction des voyageurs. Le débat entre eux était vif : on entendait des éclats de voix. Les interlocuteurs de Saint-Août montraient une direction avec de grands mouvements comme s'ils eussent jeté des trognons de pomme par-dessus un mur. Enfin, tout le monde se salua aimablement et Saint-Août revint.

  • Laissez vos effets ici, ils ne craignent rien. Je vais faire une petite promenade à pied et, si vous me suivez, vous verrez qu'elle peut vous intéresser.

Jean-Baptiste et George acceptèrent mais en laissant Küyük, pour plus de prudence, à la garde des bagages.

Aux abords du hameau étaient plantées des barrières de bois qui limitaient un enclos de choux moisis et de salades montées en graine. Au-delà commençait la forêt. Ils s'y engagèrent. C'était une dense futaie de châtaigniers avec, par places, l'espace d'une hêtraie aux troncs nus, à travers laquelle on voyait loin. Ils dépassèrent deux cantonnements dispersés dans les sous-bois puis ne rencontrèrent plus personne. Peu à peu, au chant des coucous et des alouettes se mêlèrent des coups sourds qui vibraient en écho sur les gros fûts. Saint-Août continuait de discourir en souriant. Des rais de soleil glissaient de bon appétit leur lame blanche dans de larges tranches de forêt. Tout était pur et gai ; pourtant le bruit régulier, très lent, de plus en plus proche, éveillait dans leurs coeurs un émoi sinistre.

Ils furent bientôt tout près et entrèrent dans la clairière d'où il provenait. L'espace, en un grand cercle, avait été dégagé par la coupe des arbres qui y poussaient. Le sol était occupé par d'énormes souches entre lesquelles on voyait encore, abattues, raides, de longues grumes écorcées. A l'autre bout de la clairière, une couronne silencieuse d'officiers, bras croisés, observaient, immobiles, les efforts du géant qui s'employait de toutes ses forces sur un chêne. L'entaille qu'il lui avait faite à la hache était profonde sur le devant, formant un coin pour guider la chute de l'énorme fût. Le bûcheron attaquait maintenant l'autre face. La cognée vibrait dans l'air et s'abattait avec précision en rendant le bruit sec que les marcheurs avaient entendu de si loin.

L'homme était couvert de sueur. Sa silhouette, près de l'arbre, paraissait fragile comme condition humaine lorsqu'on la compare aux grandes forces. Mais en proportion des autres personnages il était imposant. Sur sa peau laiteuse flottaient des éclats d'écorce et des grains de beauté. Il avait aux épaules des muscles saillants que l'effort roulait. Une graisse un peu raide lui entourait le ventre et effaçait ses hanches. Sans cet obstacle, sa ceinture glissait et découvrait le haut de ses fesses. Après chaque coup, il crachait dans ses mains, remontait ses culottes et reprenait la hache.

Il fit signe de loin aux nouveaux arrivants de se garer avec les autres. Cinq efforts suffirent pour que le chêne, droit de fil, large à sa base comme trois boeufs, quittât lentement la verticale et, dans un déchirant adieu de branches tendues et de feuilles arrachées, s'abattît sur le sol de la clairière, avec un grondement de canonnade.

Des applaudissements nourris, bien maigres pourtant après ces emportements, montèrent du cercle des assistants. Le géant embrassa le manche de la hache et l'envoya d'une main se planter sur le plat de la souche. Il prit la serviette qu'on lui tendait et s'en épongea le haut du corps.

Plusieurs officiers vinrent le féliciter et faire des commentaires. Un homme vêtu en civil et ressemblant vaguement à un presbytérien anglais avec son habit noir boutonné de haut en bas s'approcha et lui dit un mot à l'oreille.

Le géant hocha la tête puis, regardant dans la direction de Saint-Août, lui fit signe d'approcher.

- Venez, dit le colonel à l'adresse de ses deux compagnons. Je vais vous présenter au tsar..."


Jean-Christophe Ruffin - Sauver Hispahan



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