Le Trochiscanthe nodiflore [TN]

n°603 (2018-03)

mardi 16 janvier 2018

"Lettre hebdomadaire" du site "Rencontres Sauvages"
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Heilung - Krigsgaldr

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Matinée au bord de l'Etang :
La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)
samedi 13 janvier 2018



Vol de Grandes Aigrettes
La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)
samedi 13 janvier 2018




La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)
samedi 13 janvier 2018
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Les plumes du bas du dos sont longues et effilées...
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Grande Aigrette à sa toilette
La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)

samedi 13 janvier 2018

Envol d'un Cygne tuberculé :
il va chasser un rival qui vient de se poser sur "son" étang...
La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)

samedi 13 janvier 2018

Envol
La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)

samedi 13 janvier 2018





En compagnie d'une troupe de Harle bièvre
La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)
samedi 13 janvier 2018



Couple de Cygnes à sa toilette
La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)
samedi 13 janvier 2018

Essorage
La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)

samedi 13 janvier 2018
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Harle bièvre
La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)
samedi 13 janvier 2018
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Reflet
La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)
samedi 13 janvier 2018

En contre-jour
La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)
samedi 13 janvier 2018

La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)
samedi 13 janvier 2018
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L'Etang
La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)
samedi 13 janvier 2018

L'Etang
La Rivière-Drugeon (Haut-Doubs)
samedi 13 janvier 2018



Suggestion de lecture :

"Partons de ce bleu, si vous voulez bien. Partons de ce bleu dans le matin fraîchi d'avril. Il avait la douceur du velours et l'éclat d'une larme. J'aimerais vous écrire une lettre où il n'y aurait que ce bleu. Elle serait semblable à ce papier plié en quatre qui enveloppe les diamants dans le quartier des joailliers à Anvers, ou Rotterdam, un papier blanc comme une chemise de mariage, avec à l'intérieur des grains de sel angéliques, une fortune de Petit Poucet, des diamants comme des larmes de nouveau-né.

Nos pensées montent au ciel comme des fumées. Elles l'obscurcissent. Je n'ai rien fait aujourd'hui et je n'ai rien pensé. Le ciel est venu manger dans ma main. Maintenant c'est le soir mais je ne veux pas laisser filer ce jour sans vous en donner le plus beau. Vous voyez le monde. Vous le voyez comme moi. Ce n'est qu'un champ de bataille. Des cavaliers noirs partout. Un bruit d'épées au fond des âmes. Eh bien, ça n'a aucune importance. Je suis passé devant un étang. Il était couvert de lentilles d'eau - ça oui, c'était important. Nous massacrons toute la douceur de la vie et elle revient encore plus abondante. La guerre n'a rien d'énigmatique - mais l'oiseau que j'ai vu s'enfuir dans le sous-bois, volant entre les troncs serrés, m'a ébloui. J'essaie de vous dire une chose si petite que je crains de la blesser en la disant. Il y a des papillons dont on ne peut effleurer les ailes sans qu'elles cassent comme du verre. L'oiseau allait entre les arbres comme un serviteur glissant entre les colonnes d'un palais. Il ne faisait aucun bruit. Il était aussi simplement vêtu d'or qu'un poème. Voici, je me rapproche de ce que je voulais vous dire, de ce presque rien que j'ai vu aujourd'hui et qui a ouvert toutes les portes de la mort : il y a une vie qui ne s'arrête jamais. Elle est impossible à saisir. Elle fuit devant nous comme l'oiseau entre les piliers qui sont dans notre coeur. Nous ne sommes que rarement à la hauteur de cette vie. Elle ne s'en soucie pas. Elle ne cesse pas une seconde de combler de ses bienfaits les assassins que nous sommes.

L'étang fleurissait sous le ciel et le ciel se coiffait devant l'étang. L'oiseau aux ailes prophétiques enflammait la forêt. Pendant quelques secondes j'ai réussi à être vivant. J'ai conscience que cette lettre peut vous sembler folle. Elle ne l'est pas. Ce sont plutôt nos volontés qui sont folles. Je veux ici parler simplement de ce qu'on appelle une "belle journée", un "ciel bleu". Ces expressions désignent un mystère. Un couteau de lumière dont la lame fraîche nous ouvre le coeur. Nous sommes enfouis sous des milliers d'étoiles. Et parfois nous nous en apercevons, nous remuons la tête, oh juste quelques secondes. C'est ce que nous appelons du "beau temps".

J'imagine quelqu'un qui entre au paradis sans savoir que c'est le paradis. Il a des inquiétudes, des projets. Il est très occupé. Un bruit de fer, un cliquetis d'épées l'accompagne. C'est si banal, la guerre. Et puis tout d'un coup il y a une lumière de neige sur un étang, et un oiseau aux ailes d'or fracasse les murailles du monde. C'est quelque chose d'inespéré. Quelques secondes suffisent, n'est-ce pas, pour vivre éternellement. "Nous sentons et nous éprouvons que nous sommes éternels" : cette pensée de Spinoza a la douceur d'un enfant endormi à l'arrière d'une voiture. Nous avons, vous et moi, un Roi-Soleil assis sur son trône rouge dans la grande salle de notre coeur. Et parfois, quelques secondes, ce roi, cet homme-joie, descend de son trône et fait quelques pas dans la rue. C'est aussi simple que ça.

Je n'aime que les livres dont les pages sont imbibées de ciel bleu - de ce bleu qui a fait l'épreuve de la mort. Si mes phrases sourient c'est parce qu'elles sortent du noir. J'ai passé ma vie à lutter contre la persuasive mélancolie. Mon sourire me coûte une fortune. Le bleu du ciel, c'est comme si une pièce d'or tombait de votre poche et qu'en l'écrivant je vous la rendais. Ce bleu en majesté dirait la fin définitive du désespoir et ferait monter les larmes aux yeux. Vous comprenez ?"


Christian BOBIN - L'Homme-Joie



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