Le Trochiscanthe nodiflore [TN]

n°486 (2015-37)

mardi 22 septembre 2015

"Lettre hebdomadaire" du site "Rencontres Sauvages"
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Iron Maiden - Fear of the dark

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Portraits d'oiseaux
 de la fenêtre de ma "chambre d'amis",
sur des piquets

Pie bavarde et Rougequeue noir

Courvières (Haut-Doubs)
juin 2015



Pie bavarde

dimanche 14 juin 2015


samedi 20 juin 2015

samedi 20 juin 2015

samedi 20 juin 2015


dimanche 21 juin 2015

dimanche 21 juin 2015

dimanche 21 juin 2015

lundi 29 juin 2015

mardi 30 juin 2015

Dans l'ombre
mardi 30 juin 2015

In the dark
mardi 30 juin 2015

mardi 30 juin 2015

mardi 30 juin 2015

mardi 30 juin 2015

<image recadrée>

mardi 30 juin 2015


Toilette
mardi 30 juin 2015


<image recadrée>


mardi 30 juin 2015



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de Moineau domestique
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[numéro 481]
(2015 - 32)

Attitudes de Moineaux domestiques - printemps et été 2015 - Haut-Doubs et Suisse

Texte : G Albert-Aurier - Les Isolés, Vincent VAN GOGH

Musique : Concerto pour piano n°23 - WA Mozart (Maria Yudina, 1943)

mardi 18
août 2015



Suggestion de lecture :

"Un matin, à quelques coups d’ailes du nid, elle avait tout d’un coup pris conscience de sa vie en ne recevant plus du bec maternel la pâtée coutumière d’insectes et de fruits. Aucune fibre en elle n’avait frémi de cet abandon, l’instinct filial qui survit quelquefois chez certains animaux supérieurs à la période d’élevage n’existait pas chez elle, car la sollicitude maternelle était morte avec l’éveil de sa conscience. Elle ressentit même pas l’espèce d’ennui, né de l’ignorance, qui étreint les êtres livrés pour la première fois à eux-mêmes, en face de tous les problèmes de l’existence. Un subconscient lui disait quelle ne devait pas craindre la vie. La forêt s’ouvrait à elle comme un domaine, ruisselante de couleurs, de lumières, de rumeurs, imprégnée de chaleur, crevant de provende. Elle n’avait qu’à y pénétrer, qu’à se laisser porter sur le flux de vie née avec elle et comme pour elle ; et, légère, insouciante, caquetante et jacassante autour de ses sœurs qui, elles aussi, prenaient leur place dans la forêt, elle s’abandonna joyeuse à la vie, contemplant son sort sous un angle heureux de jeunesse, de lumière et de fête.

Ses sœurs n’étaient pour elle que la société familière aux mœurs connues, aux habitudes communes, le point d’appui sur lequel sa vie personnelle, son égoïsme de bête pouvaient se reposer ; leurs gestes, le critérium indispensable pour juger des autres habitants ailés qui hantaient comme elle les rameaux touffus des futaies forestières. Elle conservait avec elles et avec toute sa gent cette solidarité de race, moins accentuée chez les sédentaires que chez les migrateurs qui sentent bien plus, eux, devant la multiplicité des besoins, la nécessité de s’unir, de s’entraider et de se défendre mutuellement.

Elle n’aurait comme Tiécelin le corbeau porté secours à un compère en train de disputer à un dangereux rapace la proie convoitée. Elle faisait partie des privilégiés de la forêt chez qui les instincts altruistes sont le moins développés, pour l’unique raison que les besoins, ces grands maîtres des sentiments et des mobiles, étaient pour elle moins impérieux et les dangers moins pressants.

Ni les éperviers, ni les buses ne songeaient à faire de Margot leur pâture, préférant aux aléas d’une course et d’une lutte pour un morceau si peu friand, la chasse aux passereaux inférieurs, aux gallinacés sauvages, à la chair délicate, et incapables de se soustraire autrement que par la fuite à leur attaque impérieuse et violente.

Elle n’avait pas à s’inquiéter outre mesure de sa nourriture, car, peu délicate sur le choix des becquées, elle gobait indifféremment les insectes, les fruits, et n’hésitait même pas, l’occasion se présentant, à démolir ou à dévorer la couvée tardive d’un petit oiseau qu’elle assommait ou éloignait, à grands coups de bec, du nid où le retenait son instinct maternel.

Son plumage aux reflets changeants, son habit aux basques trop longues et comme étriquées, non plus que sa chair amère et coriace ne pouvaient guère tenter les humains, et elle n’avait réellement à craindre, mais elle l’ignorait, que la fantaisie meurtrière d’un chasseur désœuvré, en mal du coup de fusil où essayer son adresse.

Aussi, peu jalouse de la provende qui abondait dans la forêt, conviait-elle par un jacassement particulier, une sorte de roucoulement non disgracieux et presque tendre, les sœurs en maraude à venir partager au gros chêne de la clairière ou à l’alisier de la tranchée la robuste platée de glands ou le délicat dessert de fruits rouges et sucrés qu’elle avait découverts, et dont elles se gavaient toutes, à qui mieux mieux, en caquetant comme des hommes un peu ivres devant les reliefs d’une plantureuse ripaille.

Quelquefois, souvent même, elles accueillaient Jacquot, le cousin geai, faraud, parant son habit roux de passepoils bleus, qui s’en venait à leur invite cogner du bec lui aussi et se dilater le gésier jusqu’à l’étouffement.

Et tous les soirs, après la buvette en commun à la flaque du coin ou à la source du taillis, et les envols capricieux vers l’horizon, immobiles aux quatre coins du bois, elles répondaient à l’appel de l’ancêtre Margot, la vieille pie de la forêt qui les conviait à se rassembler dans le chêne ou dans le foyard qu’elle avait soigneusement choisi pour la nuit, selon la lune, le temps, les vents ou autres accidents secondaires, et que son instinct de bête, augmenté de sa prévoyance d’aïeule, lui avait fait élire entre tous.

Elles se reconnaissaient à petits cris joyeux, étouffés, presque attendris, sautant de branche en branche, hésitantes, capricieuses, se querellant doucement pour une place qu’elles ne désiraient pas, se bousculant, animant l’arbre tout entier dont les rameaux, les feuilles s’agitaient de leur mouvement perpétuel et semblait exhaler la joie de recéler toute cette vie fourmillante et heureuse.

Puis, petit à petit, au fur et à mesure que s’enfonçait le soleil, que diminuait la lumière et que planaient sur elles le mystère de la nuit et le danger d’attaques nocturnes, la rumeur s’assourdissait, se ponctuait de silences que ne troublaient bientôt plus que de légers cris tombant çà et là de branche en branche comme un bonsoir tardif ou un appel au sommeil.

Des jours heureux avaient passé sous le soleil ; des jours de bavardage et de goinfrerie, dans les palais verts, compliqués et changeants des taillis, dans les pavillons clairs, soleilleux de la coupe, à côté des geais lourdauds, des merles dégagés et vifs, des corbeaux cyniques et monotones et des grives méprisantes ou peureuses.

Elle connaissait les arbres hospitaliers, les ravins abrités, les sources fraîches, les oiseaux amis, les rivaux et les ennemis.

Elle avait été très surprise de voir des matins entiers les geais passer sur sa forêt, s’abattant tous comme pour une pause prévue, une halte immuable, à un même grand chêne aux branches sèches, comme au point de repère d’une étape bien définie. Elle avait d’abord suivi les premiers, puis, voyant qu’ils dépassaient la forêt et s’enfonçaient vers le midi en longue chaîne grise, les avait abandonnés pour revenir à son point de départ, et huit jours entiers, amusée et curieuse, elle avait escorté, durant leur passage par son domaine, leur monotone et long défilé.

Où pouvaient-ils aller ainsi ? Quel ennemi puissant, quel rapace à l’appétit fantastique les chassait de la forêt natale en même temps que les cohortes silencieuses des ramiers et ces nuages gris de sansonnets, tournant comme des nuées d’orage avant de s’abattre sur les chaumes herbeux ou sur des labours fraîchement retournée ? Elle suivait leur manège avec étonnement, attentive au moindre spectacle nouveau, au moindre cri inconnu.

La curiosité était le défaut de Margot, le péché mignon de toutes ses sœurs agaces, qu’elle voyait, comme elle, accourir au premier signal étranger à leur vie..."

Louis Pergaud - De Goupil à Margot



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