Le Trochiscanthe nodiflore [TN] n°192 - Mardi 10 novembre 2009

"Lettre hebdomadaire" du site "Rencontres Sauvages"
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Les Cowboys fringants - L'hiver approche

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Etude sur le Rougequeue noir II
et la faune de la falaise...
Mont d'Or (Haut-Doubs)
Samedi 26 septembre et dimanche 4 octobre 2009

Un grand Corbeau arpente le sommet de la falaise...

... puis s'envole au dessus des forêts.

Rougequeue noir femelle (encore !).

Rencontre furtive avec le Tichodrome échelette (dans l'ombre).

Un Saule courageux !

Rougequeue noir femelle : au coucher du soleil, l'ombre gagne dans la falaise.

Rougequeue noir mâle : dans les mêmes conditions.



Petit texte :

"Janet halète ; une petite haleine d'oiseau. Il a fermé les yeux. Il regarde dans son dedans ; vers la cave de sa poitrine où tant de choses se sont entassés depuis quatre-vingts ans de vie.
Et ça s'est débouché tout d'un coup, ça a coulé clair, puis épais, puis clair encore, la lie et le vin mélangés, comme si la bonde avait sauté d'un tonneau oublié.
Tu veux savoir ce qu'il faut faire, et tu ne connais pas seulement le monde où tu vis. Tu comprends que quelque chose est contre toi, et tu ne sais pas quoi. Tout ça parce que tu as regardé l'alentour sans te rendre compte. Je parie que n'as jamais pensé à la grande force ?
« La grande force des bêtes, des plantes et de la pierre.
« La terre c'est pas fait pour toi, unique, à ton usance, sans fin, sans prendre l'avis du maître, de temps en temps. T'es comme un fermier ; il y a le patron. Le patron en belle veste à six boutons, en gilet de velours marron, le manteau en peau de mouton. Tu le connais, le patron ?
« T'as jamais entendu chuinter comme un vent, sur la feuille, la feuillette, la petite feuille et le pommier tout pommelé ; c'est sa voix douce ; il parle comme ça aux arbres et aux bêtes. Il est le père de tout ; il a du sang de tout dans les veines. Il prend dans ses mains les lapins essoufflés :
« Ah, mon beau lapin, qu'il dit, t'es tout trempé, t'as l'oeil qui tourne, l'oreille qui saigne, t'as donc couru pour ta peau ? Pose-toi entre mes jambes ; n'as pas peur, là, t'es à la douce. »
« La douce amère et le ruisseau...
« Puis ce sont les chiens qui arrivent.
« Quand tu tu dis : il chasse seul, c'est qu'il t'a semé pour aller au patron.
« La belle veste à six boutons et le ballon de la clochette au cou du mouton.
« Et, sous la cabane de ses jambes, le chien et le lapin font ami, museau contre museau, poil contre poil. Le lapinot sent ton chien dans l'oreille, ton chien secoue l'oreille parce que le lapin a soufflé dedans. Il regarde autour de lui et il a l'air de dire : « C'est pas ma faute si je l'ai coursé tout le jour, dans la gineste et le labour, et les trous du ruisseau où il y a dans le profond des herbes de ficelle qui attachent les mains et les pieds. »
« Puis, c'est tout qui vient : La tourterelle, le renard, la ser, le lézard, le mulot, la sauterelle, le rat, la fouine et l'araignée, la poule d'eau, la pie, tout ce qui marche, tout ce qui court ; les chemins, on dirait des ruisseaux de bêtes : ça chante et ça saute comme un ruisseau, et ça coule et ça frotte contre les bords du chemin, et ça emporte des bouts de terre, et ça porte des branches entières d'aubépines arrachées.
« Et tout ça vient parce qu'il est le père des caresses. Il a un mot pour chacun :
« Tourtoure, route route, renar, nare »,
il lui tire des bouffettes de poils.
« Lagremuse, muse musette, museau du veau dans le seau . »
« Après il va faire un tour dans les arbres.
« Et pour les arbres, c'est pareil : ils le connaissent, ils n'ont pas peur.
« Toi, tu n'as jamais vu que des arbres qui se méfient, tu ne sais pas ce que c'est qu'un arbre, au vrai. Et ils sont avec lui comme dans les premiers jours du monde ; quand on n'avait pas encore coupé la première branche.
« ... Y avait un bois, et pas encore le bruit de la hache, pas encore la serpe, pas le couteau, sur le coteau, le bois sur le coteau et pas la hache.
« Il passe à côté, la veste en peau de mouton, et le tilleul fait le chaton qui pleure, le châtaignier fait la femme qui geint, et le platane craque en dedans comme un homme qui demande la charité.
« Il voit les blessures, les coups de couteau et les crevures de haches et il les console.
« Il parle au tilleul, au platane, au laurier, à l'olivier, à l'olivette, la sariette et le plantier, et c'est pour ça, à la miougrane, pour sa pitié qu'il est le maître et qu'ils l'aiment et lui obéissent.
« Et s'il veut effacer les Bastides de dessus la bosse de la colline, quand les hommes ont trop fait de mal, il n'a pas besoin de grand-chose, même pas de se faire voir aux couillons ; il souffle un peu dans l'air du jour, et c'est fait.
« Il tient dans sa main la grande force..."

Colline - Jean GIONO



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